Jeudi 2 avril 2020

 

Baiser les yeux – c’est tuer l’insomnie.

Je baise les yeux.

 

Baiser les lèvres – c’est donner à boire.

Je baise les lèvres.

 

Baiser au front – c’est effacer la mémoire.

 Je baise au front.                                                    5 juin 1917, Marina Tsvetaeva

 

Quand l'amie annonce son départ, sa décision prend des tonalités orange et rouges qui évoquent des couchers de soleil que l'on ne pourrait plus voir. Un monde tourne sa page. De vieilles clameurs resurgissent, crient l'abandon et la perte de leur lointain promontoire. Tu ne les entends qu'à moitié, tu connais la chanson, tu sais de quelle ruse du cerveau elles émanent, tu connais les sirènes du souvenir. Autres temps autres lieux. Autres amitiés. Défaites sous le coup de la vie et de la mort.

Ce monde-ci, qui nous reste à partager, il faudra le construire ensemble, pièce à pièce, prendre le temps de le faire plutôt que le laisser au seul hasard. C'est ici que notre véritable travail commence.

 

J'aimerai tenir ta petite tête d'orage sous mes ailes. Je tranche dans le dilemme et me repais de nos verbes à conjuguer sur la page. Lien de papier.

 

 

Nos respirations qui s’encordent de rêves.  

 

Ton regard quand tu me rends le livre. Madame c'est le premier livre que j'ai lu en entier. De ma vie. Le lien qui vient de surgir sans crier gare tournoie joyeusement autour de nous et m'alpague en un tour de main. C'est le début d'un long voyage. Tu vas voir cela vaut le détour. Lis celui-là aussi.